But Ultime
Question : Comment la réalisation du Soi s'effectue-t-elle ?
Réponse : En recevant et en conservant le pouvoir du Guru. Ce qui est déjà en vous se révèle. Une personne dont le cerveau n'est pas clair ne peut être enseignée. De la même manière, le pouvoir intérieur de connaître son Soi est réalisé en s'engageant dans la sadhana. C'est comme une connexion électrique. S'il n'était pas en vous, vous ne pourriez pas le découvrir. Tout comme certaines personnes - mais pas toutes - possèdent le don d'écrire de la poésie ou de s'exprimer oralement, etc. Si c'est le destin de quelqu'un, les écailles tomberont de ses yeux, le voile tombera. Cela se produit tout seul, un autre ne peut pas donner la réalisation ; il faut devenir propriétaire de sa propre connaissance intérieure.
Chacun est né avec ses tendances et ses talents innés. De même que l'on peut acquérir des connaissances matérielles, on peut aussi connaître la réalité en devenant propriétaire de son pouvoir intérieur - et c'est alors qu'il y a l'éveil.
Le pouvoir du Guru est conféré aux disciples, mais seul un parmi des millions est capable de le détenir. Le mantra a un pouvoir propre et sa répétition ne sera pas vaine, mais le pouvoir du Guru n'est pas conféré à tous.
Q : A mon sens, il ne peut y avoir une vision intégrale de l'Etre suprême, au plus, nous en aurons une vision partielle...
Qu'en pensez-vous ?
Mâ : Si vous pensez que l'Etre peut se mettre en morceaux, alors vous pouvez employer le terme de "partiel ".
Mais peut-il y avoir des "parts d'Absolu" ?
Vous raisonnez en termes de parts, et vous voulez prendre "votre" part, n’est-ce pas !
Il est le Tout, Celui qui est.
Q : Mais alors, il doit bien y avoir au moins des niveaux dans la Connaissance?
Mâ : Où est la connaissance des formes du Sans Forme, il ne peut y avoir de niveau.
Aller pas à pas concerne la période où l'on cesse tout juste de courir derrière les objets, et où l'on se tourne vers l'Eternel.
Dieu n'est pas encore une évidence, mais sa quête est devenue "intéressante". Cette progression réserve des foules d'expériences...
Là où est la pensée, est fatalement l'expérience !
Les expériences traduisent les mille façons d'approcher la Connaissance Suprême.
L'esprit qui s'était d'abord empêtré dans la matérialité, affirmant que jamais on ne peut savoir si Dieu existe ou non, et qui tournait le dos à "tout cela", finalement rebrousse chemin !
N’est-il pas naturel que la lumière lui parvienne, "accommodée" à sa situation ?
Tous les états possibles et inimaginables ont un nom.
Mais les états particuliers cessent, quand le Soi est enfin reconnu !
Q : Le corps peut-il survivre à l'effondrement de notre égocentrisme ?
Mâ : Le corps est-il un obstacle à la Connaissance Suprême ?
Et d'abord la question de savoir si "le corps" existe ou non, se pose-t-elle ? A un certain stade, cette question ne se pose plus. Quand elle se pose, vous n'êtes pas établi dans l'Être Pur ; et vous attendez votre réponse !
La vraie réponse se tient là où il ne peut plus y avoir ni question ni réponse... où il n'y a plus d'"autre", plus aucune division.
Alors approcher les maîtres et recevoir leurs instructions, étudier les Ecritures, n'a plus aucun sens.
Voilà, pour un aspect de la question...
Par ailleurs, vous voyez des niveaux dans la connaissance, à la manière des niveaux universitaires sanctionnés par des diplômes, quand vous cherchez. Quand le Soi est révélé à lui-même, rien de tout ça.
Un effort personnel, la pratique de la méditation, apportent certes des fruits ; mais dans le Soi, mis en lumière, il n'y a pas de but à atteindre et pas de non-but.
Bien que ce soit, ce n'est pas.
Bien que ce ne soit pas, c'est.
Voilà !
Vous dites qu'il doit subsister un vestige de fonctionnement mental. Il est pourtant un stade où le fait qu'il subsiste ou non une trace de "mentalité" n'a plus aucun sens.
Si tant de choses peuvent être consumées, ce vestige-là ne peut-il aussi être consumé ?
Il n'y a plus ni oui ni non. Ce qui est, "est".
Méditer, contempler, est une aide tant qu'on est balloté entre acception et rejet.
Vous voulez un support, n'est-ce pas ?
Le support qui vous portera plus loin, jusque-là où il n'est plus question de support et de non-support, c'est le support sans support !
Ce que disent les mots s'"éteint".
Lui, est au-delà des mots.
Bithika Mukerji : Mâ, comment peut-on expliquer la personnification de l’Etre Suprême en tant que Dieu ?
Mâ : Quoi que l’on puisse dire, Personnel, Impersonnel – Le Seigneur est Lui-même tel qu’Il est.
Il est la réalité absolue, omniprésente dans l’univers, autant que demeurant au plus profond de l’être (antaryâmin).
Il est au-delà de toute compréhension, et en même temps, Il est le Soi intérieur en chacun, n’est-ce pas ?
Lui seul est (qu’on le considère comme inconnu, ou à connaître)
Celui qui est sans nom, sans forme. Cependant, tous les Noms sont Siens, Il est présent partout et universellement manifesté.
Où n’est-il pas ? Quand on touche la main de quelqu’un, il dit : « Ceci est moi ». Même ses vêtements indiquent sa présence.
Toutes les religions reconnaissent Sa présence, elles prennent leur source en lui. Comment saisir cette immensité ?
Prenons l’exemple d’une personne seule dans le tourbillon des relations (irradiant de lui) : il est le père, le fils, le mari, le frère, etc.
Il en est ainsi dans toutes les religions. Ce sont toutes des relations intimes et chacune est unique en elle-même.
Q : Les chrétiens croient que le Christ est une Incarnation, la seule Incarnation envoyée pour sauver l’humanité. Il est le seul médiateur entre Dieu et l’homme.
Mâ : D’accord, il est certainement juste pour les chrétiens de croire cela, pourquoi pas ?
La foi perd de sa vigueur spirituelle si elle est universalisée. Ce n’est pas nécessaire d’en arriver là.
La miséricorde illimitée de Dieu est répandue partout, Lui seul sait ce qui est bon pour chacun de nous. Si chaque individu regarde son propre voyage spirituel, alors il peut apporter l’aide la meilleure à ses compagnons de route.
Chaque communication de la Vérité est un évènement unique. Aucun de ces évènements ne peut être comparé à un autre.
En célébrant cette Vérité, les communautés religieuses (sampradaya) se forment ou prennent tournure. Les communautés également sont nécessaires. Elles fournissent la cohésion, l’unité générale des objectifs à atteindre, et elles donnent du courage à ceux qui ont un moral faiblissant.
C’est une bonne idée que d’appartenir à une communauté et de marcher sous sa conduite pour obtenir l’illumination.
Il n’est pas nécessaire de se méfier de la foi de nos amis chercheurs de Vérité.
Q : Les chrétiens restent attachés très fortement à l’unique évènement historique de l’Incarnation du Christ. Ils sont engagés dans leur mission.
Mâ : Pourquoi devrions-nous poser des limites à l’infini, ou des restrictions de temps à ce qui est intemporel, c'est-à-dire l’éternel ?
L’infini a des moyens infinis pour se révéler lui-même. Personne n’a le droit de dire ‘c’est seulement ainsi et pas autrement’.
Bien que, à proprement parler, un tel credo est aussi admissible, car chaque optique est concevable. Après tout, quelle est l’étendue de ce que l’on peut rejeter - à l’intérieur de l’ensemble de la Vérité ?
Réclamer l’exclusivité est une façon de renforcer sa propre foi et sa dévotion, mais dénigrer la loyauté des autres est déplacé, injustifié.
Le véritable pèlerin devrait apprécier les efforts de ses amis grands voyageurs.
Q : Si quelqu’un croit en une seule et unique Incarnation, comment peut-il comprendre la vérité des autres manifestations ?
Mâ : L’Incarnation est vraiment seule et unique, c’est une descente, une venue, une approche, un avènement, chacun étant unique à sa façon.
Comme je l’ai dit, il n’y a rien ni personne à part Dieu.
Le vrai nœud de la question est qu’il faut aller de l’avant !
Pour avancer dans une direction, il est exigé un effort suprême, constant, déterminé, sans faille.
Se détourner de ce but par comparaisons et contrastes équivaut à ralentir, à moins que certains ne soient habitués à un renforcement de leurs objectifs dans un esprit d’unité, de communion. L’Un englobe tous les chemins menant à la réalisation de cette vérité.
Q : Mâ, on ne peut pas croire en l’Un, en l’Unique seulement. Une créature, un être, sont séparés de Dieu pour toujours.
Mâ : Oui, bien sûr. Comme Dieu ne peut pas être saisi par le mental, Il est séparé pour toujours.
Etre humain veut dire habiter dans le monde des images mentales. Le mental limite la compréhension.
Dieu est séparé de l’être parce qu’il demeure au-delà des idéalisations du mental. Ce qui est suprême est, par conséquent, au-delà encore.
Aussi, il est juste de dire ‘Dieu et sa créature’. La compréhension de la séparation est elle-même la ligne de partage [italiques ajoutées par Bithikâ].
Il est votre soi le plus profond, votre témoin le plus intérieur, votre vous le plus intime.
Q : Est-ce qu’un médiateur est nécessaire pour connaître Dieu ?
Mâ : Oui, mais Dieu lui-même se révèle comme le Gourou (Médiateur). Le Gourou est Dieu lui-même.
Lui seul connaît les exigences du vrai disciple. Pour invoquer la présence du Gourou on doit devenir un vrai disciple.
Q : Est-ce que tous les chemins ont la même valeur ?
Mâ : Oui, pour autant qu’un chemin soit suivi de façon concentrée, sincère et persévérante.
Cependant, il existe des chemins et sentiers qui se révèlent être des déviations.
Quelqu’un naît avec certaines prédilections (samskaras) qui façonnent les attitudes. La façon de vivre est un amalgame d’actions, de croyances et de connaissances (karma, bhakti, jñâna). La façon dont on organise sa vie déterminera le chemin à suivre.
Dans la sphère de la recherche de Dieu, l’aide fixe de façon inévitable, même si quelqu’un est ignorant et ne distingue pas clairement la voie juste, notre chemin est réorienté dans la bonne direction par le Gourou qui apparaît immanquablement de façon à apporter de l’aide et à montrer la route. Ce sont les propres efforts de chacun et la sincérité qui doivent être évalués, pas les faits.
Q : Comment peut-on savoir si on n’est pas en train d’errer sans but ?
Mâ : Quiconque est sur le chemin en quête de Cela est touché par la paix de la vérité.
Dans ce domaine où celui qui cherche trouve, il n’y a aucune possibilité pour qu’un véritable effort soit fait en vain, ou qu’un manque de sincérité produise des résultats.
L’effort est requis parce que l’homme utilise sa volonté pour atteindre des buts matériels.
Ainsi la volonté peut également devenir comme des courroies qui conduisent l’homme au-delà de ses limites.
En réalité, seule la miséricorde de Dieu prévaut. Quand on fait un pas vers lui, Il en fait dix vers nous.
En fait, Il est constamment avec nous. La recherche en elle-même devient, par conséquent, la conclusion.
Netaji : Vous dites que la véritable Nature est la même pour tous, mais la Gîtâ ne dit-elle pas : shreyân sva-dharmah vigunah/ para-dharmât svanushthitât/ sva-dharme nidha-nam shreyah/ para-dharma bhayâvahah ("Il est préférable de suivre sa propre loi, même médiocre, que celle d'autrui même parfaite. Il est mieux de périr en agissant selon son dharma ; suivre celui d'autrui est dangereux.") [Chant III, verset 35] ?
Mâ : En vérité, qu'est le svadharma ?
Le dharma de votre véritable Nature (svabhâva) est votre svadharma.
La sâdhanâ s'accomplit afin de remplir son propre svadharma (le devoir, le dharma propre à l'individu).
L'effort pour obtenir votre "véritable richesse", svadhâna, est appelé sâdhanâ.
Les mots de la Gîtâ sont très justes, bien entendu.
Réaliser le dharma de son propre svabhâva, de sa propre nature, est le devoir de tout être humain.
(Satsang rapporté de In association with Sri Ma Anandamayi)
Q : Quel est le but de l'existence ?
Mâ : Tendre à se connaître soi-même.
Q : Brève réponse pour une si vaste question !
Mâ : Un arbre-banian est immense, sa graine est petite ; mais dans la graine, tout l'arbre est là.