La voie de la Déesse

30

June 2025
Monday
16:48
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Le numéro 157 de la brochure Jay Ma est sorti, vous pouvez le retrouver sur ce site ou au format PDF.

Je vous propose cet extrait du livre "Sur la voie de la Déesse" de Aurore Gauer,
Le témoignage et l'expérience parlent bien plus que n'importe quelle intellectualisation...
Il faut le vivre pour le croire, il faut le croire pour le vivre...
On peut s'en donner les moyens, et c'est tout un trésor éternel qui semble se manifester alors... un trésor qui ne rouille pas... à la portée de tous.

Extrait sur Mâ Anandamayî
Tiré du livre d’Aurore GAUER

‘Sur la voie de la Déesse’

Il est sorti début 2024 chez ‘Mama Editions’, préfacé par Jacques Vigne.
Les aventures initiatiques d’une parisienne en Inde

(NOTE : L’auteure elle-même, Aurore Gauer, nous fait part de son désir que l’on publie le récit où elle relate sa première rencontre avec Swami Vijayânanda, avec Pushp Raj et son premier arati dans le samadhi de Mâ où elle reçut Sa grâce... Cela donnera peut-être envie aux dévots de Mâ d'entreprendre le voyage pour se rendre au samadhi de Mâ à Kankhâl ! Si des lecteurs souhaitaient d'aventure la contacter, elle donne l'autorisation de leur transmettre son email). Suite de notre précédent extrait du N° 155 :

« A la suite de Vijayânanda, j’emprunte par erreur l’entrée réservée aux hommes. Demi-tour au galop vers l’entrée des femmes. Je réprime un fou rire imaginant l’indignation des brahmanes s’ils m’avaient vue entrer dans le samadhî par la mauvaise porte. Je m’avance maintenant avec beaucoup de circonspection à l’intérieur du sanctuaire où les dévots se recueillent face au tombeau placé au cœur d’une enceinte sacrée. Des femmes en saris blancs achèvent la composition d’un magnifique mandala de fleurs sur le marbre immaculé. Je m’approche timidement de la balustrade pour déposer mes guirlandes dans la corbeille idoine. Mais avant que je puisse le faire, un homme torse- nu surgit devant moi et me retire violemment mon offrande des mains. Je risquais sans doute de la souiller en la touchant ! Bizarrement, je me sens honteuse comme un chien de rue qu’on vient de chasser. Pour me consoler je caresse les pétales d’une rose restée dans ma poche. Je viens prendre place à gauche de la salle derrière les femmes indiennes dont les têtes sont couvertes par le pan de leur sari. Plusieurs musiciens ont pénétré dans l’enceinte réservée aux brahmanes. Leurs dos et leurs épaules luisent sous la lumière d’un énorme lustre en verroterie. Contre le mur du fond, une imposante statue de marbre : Mâ assise en lotus nous fait face. Une serviette en éponge couleur de miel est posée sur ses épaules. Sa poitrine disparaît sous plusieurs épaisseurs de colliers de fleurs. Je me demande si Elle recevra le mien.

Soudain, les tambours et les cymbales se réveillent. Le vacarme déchire les tympans, laboure les entrailles. Aucune pensée ne peut résister à ce fracas. Le flux du mental semble totalement paralysé. Un homme aux longs cheveux et au corps à moitié nu s’incline devant le tombeau. D’une main, il agite une petite cloche, de l’autre, il tient une lampe à huile. Pivotant sur lui-même, il fait danser la flamme dans toutes les directions. Muscles tendus, nerfs à vif, dans une concentration extrême, il se contorsionne comme un serpent pris sous le charme d’un joueur de flûte invisible. Une pure et puissante sensualité se dégage de tous ses mouvements. Après l’offrande du feu et de l’encens, l’officiant présente des fleurs sur un morceau de tissu, une conque remplie d’eau du Gange dont il asperge l’assemblée, puis il brandit un bâton orné d’une volumineuse touffe de poils de yack avec lequel il caresse l’air. Au bout de quelques minutes, je suis totalement envoûtée par ce rituel à l’aspect chamanique. Je me laisse imprégner par le rythme obsédant des percussions et la fumée des encens, jusqu’à l’étourdissement, jusqu’à l’oubli de moi-même.

La puja se poursuit par les chants dévotionnels conduits par le son plaintif et aigu d’un harmonium. Alors, pour la première fois, je parcours du regard l’espace autour de moi. Les murs du sanctuaire sont couverts par plusieurs grandes fresques. A la façon des vitraux moyenâgeux, elles évoquent les différentes étapes de la vie de la sainte : sa naissance miraculeuse, son ascèse de jeunesse, son mariage mystique, une fête où elle est vénérée comme la Déesse Dourga, et enfin son entrée en Mahasamadhî. En haut d’un mur, en face de moi, une photo discrète en noir et blanc attire mon attention. Mâ y apparaît dans un sari vaporeux se confondant avec le ciel. Est-ce le Gange ou l’océan que l’on aperçoit au-delà de la terrasse ? Ses pieds menus semblent à peine toucher le sol, tandis que deux longues et fines perches à l’arrière-plan semblent lui dessiner des ailes. Le grand âge lui donne une étrange légèreté. Ses mains sont refermées l’une contre l’autre au niveau du cœur. Quel joyau contiennent-elles ? Ce visage intemporel n’en finit pas de m’interroger. Vers quel ailleurs regarde-t-elle ? Pourquoi a-t-elle toujours ce doux sourire sur les lèvres ?

Devant Son mystère, je dépose tout : la nuit blanche dans le bus, l’aurore à Derahdun, le cauchemar près du Gange, et son nom sacré que je ne peux plus m’arrêter de réciter intérieurement… Je me demande ce qu’il peut bien m’arriver encore maintenant que je suis là à Ses pieds, entièrement à Sa merci ? N’y aurait-il rien d’autre que la magie d’un rituel ? Aurais-je fait tout ce voyage pour ne voir qu’un tombeau et qu’une statue de marbre blanc ? Serait-ce folie d’espérer un signe, un geste de Sa part ? Pour en avoir le cœur net, je fixe la statue de Mâ de toutes mes forces, jusqu’à ce que ma vision se trouble et que mes yeux me brûlent… Alors, je me mets à lui parler comme si elle était vraiment en face de moi :

« J’aurais tellement voulu Te connaître ! Maintenant que ton Nom chante en moi et qu’il a enlevé les obstacles sur la route qui me menait vers Toi, ne m’abandonne pas ! S’il est vrai que Tu viens toujours à l’appel de Tes enfants, réponds-moi, je T’en supplie ! Ton silence est plus insupportable que le vacarme des tambours et des cymbales. Je ne bougerai plus, je ne quitterai pas Ta demeure sans avoir reçu la preuve de Ton amour ! Je t’en prie, ne me laisse pas dans le doute… »

Soudain, quelque chose me fait perdre le fil de mon soliloque. Je sens une présence au fond de moi qui cherche à s’exprimer. Une deuxième voix s’affirme peu à peu au-dessus de la mienne, paisible et rieuse :

« Si tu as fait tout ce voyage jusqu’ici c'est pour comprendre que je suis partout. Ce corps est là, devant toi, mais il n’a aucune importance. L’Esprit va et vient... que tu sois, je serai en toi pour toujours… Alors pourquoi te tourmenter ? »

Ai-je vraiment entendu Sa voix ? Ces mots étaient-ils les Siens ?
Mon esprit dérouté s’interroge sur ce qu’il vient de capter sans l’intervention de mes sens habituels. Je suis tout simplement abasourdie. Cependant derrière mon incrédulité, il semble qu’il y ait une forme de conscience qui comprend ce qui m’arrive et s’en félicite. N’était-ce pas ce que j’attendais depuis longtemps : une preuve de l’existence du divin suffisamment convaincante pour me donner la foi et me conduire vers l’Essentiel ?
Ces paroles ont eu un effet d’apaisement immédiat sur mon mental jusque-là agité et inquiet. Totalement indifférente à ce qui se passe à l’extérieur, j’ai enfoui ma tête sous mes bras contre mes genoux et m’abandonne à un doux bercement intérieur. J’essaye de retenir encore un peu de ce sentiment d’unité et de paix que je viens de goûter pour la première fois. Cette joie fulgurante s’accompagne d’une douleur insondable. Mâ venait de me parler, ce que je n’aurais jamais pu imaginer même dans mes rêves les plus fous, mais elle m’avait renvoyée aussitôt à moi-même. Quant à sa promesse d’être toujours en moi : je ne sais pas encore ce qu’elle signifie.

Je dois ressembler à un bien triste oiseau quand Vijayânanda vient me tirer de ma prostration. La plupart des dévots ont disparu, la cérémonie est terminée. La tête lourde, je me lève en titubant. Avant de quitter le sanctuaire, je dépose discrètement au pied d’un pilier ma petite fleur froissée en lançant un dernier regard vers le tombeau. Dehors, Vijayânanda me conduit dans la boutique de l’ashram. Au milieu d’un bric-à-brac d’objets à l’effigie de la sainte et de piles de livres, je choisis rapidement quelques photographies que j’offrirai à mes amis.

Vijayânanda ne s’est jamais douté de ce qui m’arrivait à ce moment-là. J’ai gardé longtemps le silence sur cette expérience mystique qui allait profondément transformer mon être et donner à mon existence une nouvelle orientation. Les paroles de Mâ résonnent encore dans le secret de mon cœur et m’accompagnent pour l’éternité…

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Issue 157 of the Jay Ma brochure is now available. You can find it on this website or in PDF format.

Here is an excerpt from the book ‘Sur la voie de la Déesse’ (On the Path of the Goddess) by Aurore Gauer.
Testimonials and experiences speak louder than any intellectualisation...
You have to live it to believe it, you have to believe it to live it...
We can give ourselves the means to do so, and then a whole eternal treasure seems to manifest itself... a treasure that does not rust... within everyone's reach.

Excerpt on Mâ Anandamayî
From the book by Aurore GAUER

‘Sur la voie de la Déesse’

Published in early 2024 by ‘Mama Editions’, with a preface by Jacques Vigne.
The initiatory adventures of a Parisian woman in India

(NOTE: The author herself, Aurore Gauer, has expressed her desire for us to publish the story in which she recounts her first encounter with Swami Vijayânanda, with Pushp Raj and her first arati in Ma's samadhi where she received Her grace... Perhaps this will inspire devotees of Ma to make the journey to Ma's samadhi in Kankhal! If any readers would like to contact her, she has given permission for us to pass on her email address).

Continuation of our previous excerpt from No. 155:


"Following Vijayânanda, I mistakenly take the entrance reserved for men. I quickly turn around and head for the women's entrance. I suppress a giggle as I imagine the indignation of the Brahmins if they had seen me enter the samadhi through the wrong door. I now proceed with great caution into the sanctuary where devotees gather in front of the tomb located in the heart of a sacred enclosure. Women in white saris are finishing a magnificent mandala of flowers on the immaculate marble. I timidly approach the balustrade to place my garlands in the appropriate basket. But before I can do so, a bare-chested man appears in front of me and violently snatches my offering from my hands. I was probably in danger of defiling it by touching it! Strangely, I feel as ashamed as a stray dog that has just been chased away. To console myself, I stroke the petals of a rose left in my pocket. I take my place on the left side of the room behind the Indian women, whose heads are covered by the fabric of their saris. Several musicians have entered the enclosure reserved for Brahmins. Their backs and shoulders glisten under the light of an enormous glass chandelier. Against the back wall stands an imposing marble statue: Ma, seated in the lotus position, faces us. A honey-coloured terry towel is draped over her shoulders. Her chest disappears under several layers of flower necklaces. I wonder if she will accept mine.

Suddenly, the drums and cymbals awaken. The noise pierces the eardrums, ploughs through the guts. No thought can resist this din. The flow of the mind seems completely paralysed. A man with long hair and a half-naked body bows before the tomb. In one hand, he rings a small bell, in the other, he holds an oil lamp. Spinning around, he makes the flame dance in all directions. Muscles tense, nerves on edge, in extreme concentration, he contorts himself like a snake under the spell of an invisible flute player. A pure and powerful sensuality emanates from his every movement. After offering fire and incense, the officiant presents flowers on a piece of cloth, a conch filled with water from the Ganges, which he sprinkles on the assembly, then brandishes a stick adorned with a voluminous tuft of yak hair with which he caresses the air. After a few minutes, I am completely spellbound by this shamanic ritual. I let myself be immersed in the haunting rhythm of the percussion and the smoke of the incense, until I am dizzy, until I forget myself.

The puja continues with devotional songs accompanied by the plaintive, high-pitched sound of a harmonium. Then, for the first time, I look around the space around me. The walls of the sanctuary are covered with several large frescoes. Like medieval stained glass windows, they depict the different stages of the saint's life: her miraculous birth, her youthful asceticism, her mystical marriage, a festival where she is worshipped as the goddess Dourga, and finally her entry into Mahasamadhî. At the top of a wall opposite me, a discreet black and white photo catches my eye. Mâ appears in a flowing sari that blends into the sky. Is it the Ganges or the ocean that can be seen beyond the terrace? Her tiny feet seem to barely touch the ground, while two long, thin poles in the background seem to form wings. Her advanced age gives her a strange lightness. Her hands are clasped together at her heart. What jewel do they hold? This timeless face never ceases to intrigue me. Where is she looking? Why does she always have that sweet smile on her lips?

Before Her mystery, I lay down everything: the sleepless night on the bus, the dawn in Derahdun, the nightmare near the Ganges, and Her sacred name that I cannot stop reciting inwardly... I wonder what else could happen to me now that I am here at Her feet, entirely at Her mercy? Is there nothing more than the magic of a ritual? Have I made this whole journey only to see a tomb and a white marble statue? Would it be madness to hope for a sign, a gesture from Her? To find out for sure, I stare at the statue of Ma with all my strength, until my vision blurs and my eyes burn... Then I start talking to her as if she were really in front of me:

"I would have loved to know You! Now that Your Name sings within me and has removed the obstacles on the path that led me to You, do not abandon me! If it is true that You always answer the call of Your children, answer me, I beg You! Your silence is more unbearable than the noise of drums and cymbals. I will not move, I will not leave Your dwelling place without receiving proof of Your love! Please, do not leave me in doubt... "

Suddenly, something interrupts my soliloquy. I feel a presence deep within me seeking to express itself. A second voice gradually asserts itself above mine, peaceful and cheerful:

"If you have travelled all this way, it is to understand that I am everywhere. This body is here, before you, but it has no importance. The Spirit comes and goes... Wherever you are, I will be in you forever... So why torment yourself?"

Did I really hear His voice? Were those words His?
My confused mind wonders what it has just picked up without the intervention of my usual senses. I am simply stunned. However, behind my disbelief, there seems to be a form of consciousness that understands what is happening to me and welcomes it. Wasn't this what I had been waiting for for so long: proof of the existence of the divine that was convincing enough to give me faith and lead me to the Essential?
These words had an immediate calming effect on my previously agitated and anxious mind. Totally indifferent to what was happening outside, I buried my head under my arms against my knees and surrendered to a gentle inner rocking. I tried to hold on a little longer to this feeling of unity and peace that I had just experienced for the first time. This overwhelming joy was accompanied by unfathomable pain. Mâ had just spoken to me, something I could never have imagined even in my wildest dreams, but she had immediately sent me back to myself. As for her promise to always be within me, I still don't know what that means.

I must look like a very sad bird when Vijayânanda comes to pull me out of my prostration. Most of the devotees have disappeared, the ceremony is over. My head heavy, I stagger to my feet. Before leaving the sanctuary, I discreetly place my little crumpled flower at the foot of a pillar, casting one last glance at the tomb. Outside, Vijayânanda leads me to the ashram shop. Amidst a jumble of objects bearing the saint's image and piles of books, I quickly choose a few photographs to give to my friends.

Vijayânanda never suspected what was happening to me at that moment. For a long time, I kept silent about this mystical experience that would profoundly transform my being and give my life a new direction. Mâ's words still echo in the secret of my heart and accompany me for eternity...